Sous un ciel de plomb, le vent gémit,
Cent vingt regards fixés sur le ciment.
Pas lents, hésitants, vers ce donjon noir,
Le cœur battant fort, une étrange peur.
Le temps s'arrête, un instant suspendu,
Les échos du passé, un cri étouffé.
"Qu'y aura-t-il là-bas ? Un mystère, un secret ?"
Les murs semblent murmurer à nos rhétos, un récit inconnu :
"Un matin de septembre 1942, le premier du mois. Nous sommes une trentaine dans un camion boche, sur des bancs. Il pleut, bien... comme il sait pleuvoir à Bruxelles. Par les trous de la bâche, nous apercevons certains bâtiments, certaines rues larges, qui mènent vers Laeken. L'église de Laeken.
Quelqu'un parmi nous murmure : Breendonck !
Breendonck ! un camp dont très peu des nôtres ont entendu parler, et pour cause : on y emprisonne beaucoup, on y libère très, très peu...
Une vague angoisse nous étreint : serait-ce Breendonck, la destination ? Et qu'est-ce que cela signifie ?
On roule, et toujours la pluie qui claque sur le camion. On roule vers... on ne sait. On se tait...
Quelques minutes avant 8 heures ; le camion tourne et s'arrête devant un fort ; c'est ça Breendonck ? Barbelés, coupoles noires, voûtes sombres. On descend du camion. Et tout de suite, brusquement, brutalement : la Kultur allemande !
Nous sommes reçus par un officier, lieutenant SS, nommé Praus : allemand pur sang, paraît-il, et fixés de suite.
Encore près du camion, nous regardons : cette sombre brute hurle, à vingt mètres de nous ; les plus ignobles injures que comporte un vocabulaire allemand, injures où la scatologie a la place d'honneur !
Cravache levée, rauque, déchaîné,· menaçant :
« Vous êtes ici chez les SS et je vous apprendrai ce que c'est que Breendonck ! »
Le tout avec des insultes, impossibles à reproduire avec une encre honnête.
Et nous croyions avoir compris. Pauvres de nous ! Et la danse commence ...
A coups de pied, coups de poing, nous sommes rangés dans un couloir, face au mur : très près !..."
Extrait de : Lansvreught P et Lemaitre R. (s.d.) Le calvaire de Breendonck. Bruxelles.
Merci de leur montrer ce que l'Homme a de pire en lui et d'espérer que le "plus jamais ça" soit une leçon que jamais ils n'oublient.